Le Goût des confitures nous ramène dans les souvenirs de son auteur, Bob Oré Abitbol, dans ce Maroc, aujourd’hui disparu, où se mêlaient les différentes communautés culturelles et religieuses. Beaucoup se retrouveront dans ces jeunes adolescents au teint hâlé et aux yeux pétillants, d’autres se souviendront avec émoi de ces personnages qui peuplèrent leur Maroc du passé, et sur qui l’auteur pose un regard d’une rare délicatesse. Dans son style très particulier, une sorte de parole écrite à musicalité qui fait ressentir les choses, cet homme au grand cœur nu nous éclaire à rebours notre quête d’enfance, nous menant avec lui, d’errances en délivrances. Derrière le miroir déformant de la mémoire, il arrive à sertir des moments de vie et à en approfondir le sens. Sa pensée roule comme une locomotive : toutes les images se précipitent ensemble, se bousculent, s’entremêlent pour prendre leur vol, et dans sa frénésie, il nous entraîne sur les rails de notre passé. L’auteur a une approche crue et, à la fois, d’une simplicité qui nous désempare. Il est tellement franc que nous en sommes désarçonnés. Bien qu’ayant une parfaite maîtrise de la langue française, Bob Oré Abitbol se permet toutes les extravagances. Dans une langue irrégulière et saisissante, négligeant toutes concordances de temps, le parfait devient présent et le présent, passé. À qui importent les points et les virgules quand on aime ? Car c’était bien cela « la langue de chez nous » le français du Protectorat !