C’est devenu un lieu commun: les fake news ont envahi internet, et c’est la faute aux médias sociaux. Mais est-ce vraiment le cas? Comment expliquer cette vague de désinformation? Sommes-nous réellement entrés dans l’ère dite de la «post-vérité»? Pour Philippe de Grosbois, il s’agit d’abord et avant tout d’une crise de confiance envers le journalisme «positiviste», qui prétend être fondé sur des faits empiriques et une éthique de la neutralité. Si les fausses nouvelles prolifèrent, ce n’est pas simplement parce qu’un public passif et crédule se fait berner par des «faits alternatifs», mais parce que les récits des médias traditionnels sonnent de plus en plus faux à nos oreilles. Parallèlement à la montée du néolibéralisme, un nouveau «régime de vérité» a émergé à la fin du siècle dernier: non plus celui des faits tangibles et soi-disant «objectifs», comme dans le journalisme positiviste, mais celui de la vérité ressentie. Le succès des radios d’opinion, la multiplication des chroniqueurs démagogues ou l’élection de Donald Trump en témoignent, ce sont principalement les forces de droite et d’extrême droite qui ont accaparé ce régime de vérité. Pandémie aidant, les théories complotistes ont gagné du terrain, brouillant encore davantage les frontières entre le réel et le virtuel, le vrai et le faux. C’est la collision des récits. Pour regagner la confiance du public, les journalistes auraient intérêt à opérer un virage dans leur rapport à la vérité et au pouvoir. Accepteront-ils de reconnaître les biais inhérents à leur métier? Sauront-ils renouer avec les citoyen.ne.s dans un esprit de démocratisation de la société? Malgré les critiques qu’il leur adresse, c’est l’espoir que porte Philippe de Grosbois avec cet essai qui déjoue tous les clichés sur le quatrième pouvoir.